Si nous voulons comprendre ce qu’est un traumatisme, nous devons nous pencher sur les neurosciences. La recherche en neurosciences a produit une découverte intéressante: la partie rationnelle du cerveau n’a pas de connexions directes avec la partie du cerveau qui est sous l’influence des réactions émotionnelles. Cette partie du cerveau est le cerveau limbique, primitif ou animal qui focalise uniquement sur la survie.
Cela veut dire que nous ne pouvons pas parler ou raisonner avec cette partie du cerveau, par exemple nous ne pouvons pas nous persuader d’aimer cette personne ou de ne pas l’aimer puisque cette partie est inaccessible au raisonnement rationnel. La seule partie du cerveau qui est en contact avec le cerveau limbique est la partie média frontale du cortex qui se trouve juste au dessus des yeux et cette partie est responsable pour les expériences intéroceptives.
La seule façon d’entrer en contact avec la partie limbique du cerveau est de porter notre attention aux expériences que nous faisons avec nous même. C’est également la seule route qui mène vers les expériences traumatiques et leur guérison.
Plus nous pouvons porter notre attention aux expériences que nous faisons avec nous même, plus nous pouvons lire nos expériences intérieures et plus nous pouvons nous auto-contrôler. Par conséquent, nous devons aller à l’intérieur de nous même pour nous transformer et nous guérir si nous sommes traumatisés ou si nous avons des troubles de l’humeur. La méditation est un chemin prometteur pour cela.
Il y a aujourd’hui beaucoup de recherches sur le cerveau des moines qui démontrent ce qui se passe lorsque nous méditons.
La taille du cortex préfrontal médian détermine notre capacité d’attention. Cette partie correspond d’ailleurs à ce que les hindous appellent le 3ième oeil. Si nous avons développé cette partie du cerveau au travers de la méditation, au lieu de paniquer dans certaines situations dans lesquelles la partie limbique est activé, nous pouvons nous dire: ah c’est cela qui se passe en moi, réfléchis calmement à ce que tu peux faire pour résoudre le problème.
Moins cette partie du cerveau est développé, plus nous avons tendance à réagir de manière instinctive, c’est à dire avec du stress. La taille du cortex préfrontal médian détermine réellement à quel point nous sommes pris en otage par nos émotions et nos réactions automatiques ou à quel point nous pouvons faire preuve de maîtrise de nous même. La seule manière d’agrandir cette partie du cerveau est de faire des exercices de méditation, exactement de la même manière que pour développer nos muscles, c’est à dire en nous entrainant.
C’est ce que le chercheur en neurosciences Richard Davidson a étudié au contact de moines tibétains en exil. Après des milliers d’heures de méditation leur partie limbique du cerveau ne réagit que très faiblement aux stimuli aversifs et leur organisme reste calme, concentré et attentionné.
Aujourd’hui il y a suffisamment d’évidence qu’il y a une corrélation entre la pratique régulière de la méditation et la capacité de calmer son système limbique. Le yoga est également une pratique très intéressante pour arriver aux même résultats. Dans le cas de personnes traumatisées, le yoga peut parfois être plus adapté que la méditation, car la méditation peut faire surgir des sensations trop fortes qui ne sont pas gérables par le traumatisé, l’exposant ainsi à une ré-traumatisation.
Dans une de ses conférences, Dr Bessel van der Kolk, spécialiste du traumatisme, rapporte le cas d’un couple qui a été traumatisé dans un carambolage dans lequel ils étaient piégés dans leur voiture jusqu’à ce que les pompiers réussissent à les libérer. Ils ont été conduit à l’hôpital et comme ils avaient peu de blessures, ils sont sortis rapidement et ont pu retourner à leur vie normale. Seulement les jours et semaines qui ont suivi cet évènement des symptômes du stress post-traumatique sont apparus, c’est à dire des difficultés de concentration, des insomnies, une grande irritabilité ect, symptômes auxquels ils réagissaient en buvant de l’alcool et en se disputant. Si l’on demandait a posteriori à ce couple de décrire leur ressenti au moment de l’accident, ils pourraient avoir une réaction émotionnelle très forte et pourraient même penser qu’ils étaient en train de mourir, alors qu’il sont assis tranquillement dans un fauteuil. A travers le récit, ils pourraient être plongé dans l’évènement traumatique, car leur cerveau rationnel s’étaint déconnecté sous l’influence du cerveau limbique et lorsque cette partie est déconnecté, il n’y a plus de notion de temps.
La personne ne fait point la différence entre ce qui s’est passé au moment de l’accident et le moment présent. C’est exactement ainsi que nous pourrions produire ce que l’on appelle un flashback (souvenir traumatique) qui aggrave le trouble traumatique, notamment parce que le cerveaux devient insensible en se coupant de tout ressenti émotionnel et cette anesthésie se poursuit ultérieurement dans la vie. Ainsi l’individu devient une sorte de zombie, mais de faire cela n’est certainement pas le but d’un traitement thérapeutique.
Le but thérapeutique est l’intégration du souvenir traumatique dans la mémoire pour que le trauma devient un élément désensibilisé du passé. Pour cette raison, il est nécessaire d’aider le patient à maintenir présente la partie du cerveau qui s’est déconnecté et qui peut percevoir calmement et avec une certaine distance ce qui s’est passé, mais aussi ce qui est présent maintenant pour que le patient puisse dire: oui, cela m’est arrivé dans le passé, mais aujourd’hui je suis en sécurité, je suis présent dans l’ici et maintenant, je suis en vie.
Dans le traitement du trauma, il s’agit d’abord de créer une intégration du cerveau pour permettre une intégration du souvenir. Selon Dr Bessel van der Kolk, il n’y a aucun bénéfice de revivre le trauma, sauf si la personne se trouve dans un état de conscience différente et en possession de tout son cerveau, ce qui est favorisé par la capacité de rester présent et conscient.La méditation peut aider ces patients à arriver à cette désensibilisation par l’intégration.